4 octobre 1993 - 4 octobre 2018
CHAMPIONNE DU MONDE EN 1993
- RETOUR SUR LE TITRE d’une championne
devenue aujourd’hui Elisabeth Chevanne-Brachet -
- A quelques heures de ce championnat Elisabeth Chevanne-Brunel nous livrait ses impressions sur le parcours. "Je viens de découvrir le parcours à Perth en Australie. D’après Bernard Bourreau l’entraîneur national des juniors, ce serait le parcours les plus durs de tous les championnats du monde de cyclisme juniors.
- D’après moi, le parcours est plus difficile que celui d’Athènes en 1992. En effet, il n’y a déjà pas un mètre de plat et les bosses ont des pourcentages qui vont de 8 à 13% avec une surtout à 3 kilomètres de l’arrivée d’une longueur de trois kilomètres en paliers. En fait c’est un parcours qui m’ira très bien car il est très sélectif.
- Par ailleurs, je suis en bonne condition, il y a une bonne ambiance dans l’équipe de France, l’hôtel où nous dormons est très agréable, la nourriture est bonne. Enfin tout va bien, il ne me reste plus qu’à être en forme le jour J et avoir confiance en moi."
4 OCTOBRE : UNE JOURNÉE PAS COMME LES AUTRES
- Il est 18h30 en Australie et le téléphone sonne dans la chambre 64 du Great Eastern Motor Lodge à Perth. Une voix timide se fait entendre. "Oui, j’ai gagné !" Il est 11h30 du matin en France, Elisabeth est championne du monde mais, à l’autre bout du globe, elle ne réalise pas tout à fait la portée de l’exploit. Et pourtant il est de taille.
- Championne du monde ! Elisabeth Chevanne-Brunel, la petite Périgourdine aux yeux malicieux, a concrétisé, à Perth, dans une course toute de panache, les promesses d’Athènes, quand elle avait surgi de nulle part, pour prendre la seconde place des Mondiaux juniors. "J’étais venue pour gagner", nous confie-t-elle. "J’étais en bonne condition, mais à la veille de la course, je ne savais pas trop où j’en étais car je n’avais pas couru depuis quelques semaines."
- Elle fut vite rassuré, car elle trouva un circuit à parcourir cinq fois, convenant parfaitement à ses qualités de grimpeuse. Dès le troisième tour elle saisit sa chance et s’échappa, avec ce panache qui sied aux exploits. "Les filles se regardaient toutes. Alors j’ai décidé de durcir la course. Je suis partie, mais, trop légère dans les descentes, j’ai été reprise au bout d’un tour et demie. Alors je me suis dit qu’il valait mieux me réserver pour le sprint d’arrivée, qui avait lieu en côte."
- Un sprint merveilleux, comme dans un rêve, qui lui donnait cet arc-en-ciel dont elle rêvait tant. "Je dois beaucoup à mes camarades de l’équipe de France, Karine Boitier et Sophie Swaertvaeger, qui ont protégé ma fuite. Elles ont fait un super boulot pour moi."
- Avec Elisabeth Chevanne-Brunel, la Dordogne tient une bien jolie championne, dont le talent s’est peu à peu affirmé, pour la conduire jusqu’à ce titre riche de promesses. "Elle a signé sa première licence à 14 ans," révèle son père Alain, heureux, on le devine, de cette couronne qui rejaillit sur toute la famille. "Elle a progressé petit à petit." Quatre victoires en 1989, onze en 1990, elle commence en 1991 à pointer le bout de son nez chez les grandes, en remportant trois victoires toutes catégories, devenant la meilleure junior française.
- En 1992, elle se lance dans la grande aventure du Tour de France, dans l’équipe de Jeannie Longo, terminant à une trentième place pour le moins honorable. Mais surtout, elle échoue d’un souffle à Athènes pour le titre de championne du monde, battue qu’elle est par l’Allemande Anke Kupfernagel.
- Pour Zabou, ce titre superbe récompense à tous ses efforts, vient effacer les déboires d’une saison où sa renommée toute neuve ne lui a pas permis de toujours s’exprimer. Et ferme la blessure encore fraiche d’un Tour de France décevant, en regard des espoirs qu’elle y avait placé. "Dans l’étape de l’Alpe d’Huez, alors qu’elle avait lâché cinq des concurrentes qui la précédaient au général, elle a eu des ennuis mécaniques et personne dans l’encadrement de l’équipe de France n’est venu la dépanner", explique son manager de père. "Elle était dégoûtée, et voulait quitter ce milieu."
- A la Pédale Faidherbe, où elle s’est toujours entraînée avec nos collègues masculins, on va se sentir fier de ce titre. C’est un peu à ses copains qu’Elisabeth doit son titre. Et chez les Chevanne-Brunel, le champagne pétillait d’une douce euphorie hier soir !
JE SUIS FIÈRE DE MA SŒUR
- Dès huit heures ce matin, le téléphone n’a pas arrêté de sonner. Alain Brunel, le papa d’Elisabeth n’a pas quitté le combiné dès que la nouvelle s’est répandue comme trainée de poudre.
Quelques supporters de Zabou dont Ingrid sa soeur, le président Le Moil de la Pédale Faidherbe,
Bernard Estève secrétaire du même club et Jean-Claude Coustillas du CDOS
- La riante maison des environs de Chalagnac, perdue dans la verdure, avait perdu sa tranquillité. Les premiers à appeler furent les dirigeants de la Pédale Faidherbe, le club de Zabou, du président Le Moil à Bernard Estève, sans oublier les amis des autres clubs.
- Ils étaient heureux tous les proches d’Elisabeth. Elle le cachait bien mais la plus heureuse était certainement Ingrid, sa sœur cadette d’un an : "Alain m’a réveillé à six heures pour annoncer cette formidable nouvelle. Je suis fière d’elle, c’est vraiment extraordinaire. Ce titre ne m’a pas surpris, quand elle m’avait téléphoné avant la course, elle était très motivée."
- En tout cas, Ingrid connait le mieux sa sœur, tout cet été elle a arpenté les routes de France et de Dordogne avec elle. Elle savait l’intense frustration qu’avait ressentie Elisabeth après ce final raté du Tour de France. "Elle me demandait souvent si elle allait être championne, je lui répondais que oui". On se doute qu’en arrivant au lycée, la petite sœur annonça la bonne nouvelle à tout le monde. La cour de récré avait son sujet de conversation. !
- Cet entourage d’Elisabeth, il ne cache vraiment pas sa joie. Charly Denis et pas mal d’autres coureurs de l’Asptt roulent souvent à l’entraînement avec Zabou. Charlie ne cache pas son admiration : "Elle a tellement travaillé et tellement de talent qu’elle mérite ce titre. C’est bien pour son père aussi qui a fait tant de sacrifice. A l’entraînement, nous ne lui faisons pas de cadeau et il n’est pas question qu’elle reste dans les roues."
D'autres supporters : Jean-Claude Gardet conseiller général du Lardin, Charlie Denis camarade d'entraînements
Didier Virvaleix ex-pro et Jean-Pierre Sant-Amand conseiller général de Vergt
- Didier Virvaleix, le porte fanion de notre cyclisme, même s’il court sous les couleurs de Montauban, n’a appris la nouvelle que tard dans l’après-midi : "Je suis épaté. Je suis content pour elle, pour sa sœur, son père, sa mère, ils ont tellement fait de sacrifices. En tout cas, je ne suis pas un cycliste mysogine. C’est fini l’époque des Longo-Madiot".
- Au Conseil Général, là où travaille Annie la maman, ce ne fut pas la révolution, n’empêche, Jean-Claude Coustillas, chef de service dans l’endroit et dans le "civil" président du comité de basket et vice-président de l’Olympisme en Dordogne, se montrait particulièrement fier : "La mère est une collègue de travail, Elisabeth, nous l’avions déjà récompensé à travers les silex. Elle n’est pas grande mais tellement gentille, ça change de ces basketteuses de plus de 1m80, souvent effrontées."
- Cette année Zabou comme l’appellent ses proches, avait été parrainée par le Conseil Général pour une bourse de 30 000 francs. Jean-Claude Gardet, le conseiller général du Lardin, est bien placé pour apprécier la valeur de l’exploit. Certains disent d’ailleurs que le Jean-Claude en question, coureur de talent dans sa jeunesse, eut pu accomplir une carrière de pro : "Cela va permettre de redorer le blason cycliste de la Dordogne. J’ai couru avec Huot, Vivier et Dupré. Depuis, il n’y a pas eu grand-chose si l’on excepte Brun et Virvaleix. Pour en revenir à Elisabeth, j’ai suivi son Tour de France".
- Le mot de la fin, on le laissera à Jean-Pierre Saint-Amand, le conseiller généra de Vergt, le canton de Chalagnac : "Avec Huot, Labrousse et maintenant Zabou, le canton a produit trois beaux champions. Croyez-moi, on ne va pas la laisser revenir comme cela ; je vais voir avec ma collègue mairesse de Chalagnac..."
- Pour sur, le succès de Zabou a réjoui tout le monde !
ÉLISABETH, LA FUSÉE DE POCHE !
Interview à chaud à son retour au journal Sud-Ouest
- Elle est de retour au pays, Elisabeth Chevanne-Brunel, celle que la presse Australienne a baptisée "the pocket-rocket", après son titre de championne du monde..
- Elle a les yeux amande et le visage rieur, illuminé d’un superbe sourire. Un côté charmant et sympa qui vous désarme. Elisabeth Chevanne-Brunel, de retour en Dordogne est passée à "Sud-Ouest" pour donner son amical bonjour. Elégante, dans son maillot de championne du monde pourtant un rien trop grand, elle ne réalise pas totalement tout ce qui lui arrive et revit, nostalgique, les milles souvenirs de son séjour australien, premier rêve assouvi d’une athlète en devenir.
- Perth restera marqué à tout jamais au fond de sa mémoire, avec cette course de panache, conclue en apothéose, ces félicitations chaleureuses d’une équipe de France radieuse. "Pocket-rocket" titrait la presse australienne, au lendemain du triomphe de la petite "puce périgourdine". Oui, elle, la fusée de poche s’était hissée au prix d’un talent en pleine maturation, au pinacle de la discipline.
- "Ce jour là, j’étais au dessus du lot. Mais je dois remercier Sophie Swartwegger" confie-t-elle. "Elle a fait tout le boulot derrière pour casser le rythme. Elle a chuté dans le sprint final, mais juste avant elle m’avait dit "ce titre tu vas le gagner". Je lui dois beaucoup. Perth, l’Australie, comment cette jeune fille de 18 ans pourrait-elle oublier ce voyage enchanteur et ces moments magiques vécus par la seule grâce du sport ? "C’était la première fois que j’allais aussi loin" avoue-t-elle. "Je rêvais depuis toujours d’aller en Australie. J’en ai découvert les divers aspects. Ce côté grande ville américaine avec Perth, le côté Hawaï avec Fremantle et le côté désertique, avec ces collines de sable rouge."
- Pour Zabou, la vie, dans le tourbillon chatoyant de cet arc-en-ciel sublime, s’est subitement accéléré. "Je n’avais pas envie de partir parce que c’était le début de l’été, mais en même temps j’étais heureuse de rentrer, de retrouver ma famille que je n’avais pas vue depuis quinze jours." Championne du monde, il lui faut maintenant faire face à sa notoriété toute neuve, satisfaire les demandes qui ne cessent de tomber sur ce téléphone infernal. "Cela fait plaisir de voir que l’on s’intéresse à moi."
- Une réception en Bourgogne chez la grand-mère. Une course aux Herbiers dès son retour, Elisabeth n’a guère eu le temps de souffler. "Au début, aux Herbiers, les gens ne se sont pas intéressés à moi, parce qu’il y avait Graham Obree et Chris Boardman", souffle-t-elle. "Et puis petit à petit, quand ils ont découvert que je venais d’être sacrée championne du monde, ils sont venus. J’ai dû signer toute une série d’autographes."
Podium mondial avec Cinzia Faccini (Italie), Elisabeth Chevanne-Brunel championne du Monde,
Karine Boitier (France) troisième.
- Aujourd’hui, Elisabeth Chevanne-Brunel a retrouvé la Dordogne et ses nécessités d’un quotidien tranquille. Il lui reste ce maillot, cette médaille et une multitude de souvenirs dans la tête. "Il va falloir que je me remette les idées en place." Reprendre le travail scolaire et passer mon bac. Important pour elle qui comme Catherine Marsal, l‘autre championne du monde junior française, rêve de faire du journalisme.
- L’avenir elle y pense, il s’étend prometteur et riche de conquêtes. "Je vais être surveillée", s’amuse-t-elle. "Mais j’en ai l’habitude. Depuis que je suis junior, on me met la pancarte sur le dos. Mon héritage est peut-être lourd à assumer, mais cela ne me fait pas peur. Je me donne deux ans pour arriver au top niveau chez les séniors..."
- Un superbe challenge, comme elle les aime. Gageons que cette fille, à la force caractère peu commun, saura se donner les moyens de réussir. Elle rêve encore de couronnes mondiales, d’Atlanta. Et de l’Australie, terre d’asile, théâtre de son premier triomphe. Ça tombe bien ! Les jeux de l’an 2000 auront lieu à Sydney...
La fête à Chalagnac avec Zabou, votre serviteur et son épouse (il y a 25 ans)
- Tout savoir sur la carrière de Zabou en cliquant sur ce LIEN
VÉLO DORDOGNE - ZABOU : 25 ANS DÉJĀ © BERNARD PECCABIN
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