BORDEAUX-PERIGUEUX 1965
LA VICTOIRE DE JEAN RICOU (Royan OC)
Merci à Jacques Bégué qui nous a adressé cette photo de l’arrivée jugée rue Pagès
à Périgueux. Au fond on aperçoit les cheminées des Etablissements Laforêt,
aujourd’hui remplacés par le Centre Leclerc
Présentation de l’édition 1965
- Organisée par le Cyclo-Club Bordelais, cette course connut une lutte âpre au possible et elle mit sur le pavois des coureurs parmi les plus réputés d’entre les deux guerres. En voici d’ailleurs quelques-uns des résultats :
- 1934 : 1° Jean Fréchaud (UC Arcachon), 2. Gavelle (Girondins de Bordeaux), 3. Bramard (Bordeaux)
- 1935 : 1° Fernand Nieto (Monrepos VC), 2. Bramard, 3. Giovani Pédandola
- 1936 : 1° Jean Fréchaud (UC Arcachon), 2. Bergerioux, 3. Duteil (Mareuil)
- 1937 : 1° Jérôme Boudé (Bazas), 2. Robert Laforgue (Bordeaux), 3. Jean Ronteix (Périgueux), puis après guerre, Michel Gonzalès, par deux fois, en 1962 et 1963, l’enleva et en 1964, Roger Darrigade y fit briller les couleurs Dacquoises.
- Bordeaux-Périgueux a donc un brillant passé. Organisée par Le Cyclo-Club Bordelais, avec le concours du Cyclo-Club Périgourdin, l’épreuve est placée sous le haut patronage de nombreuses personnalités : M. Chaban Delmas, président de l’assemblée nationale, maire de Bordeaux, M. Barrière, maire de Périgueux, M. le Président du Conseil Général de la Dordogne et par Messieurs les organisateurs de la foire exposition de Périgueux.
- Internationale, ouverte aux amateurs, indépendants hors catégories et de toutes catégories. Les organisateurs comptent sur une très forte participation, notamment espagnole, dirigée par le sélectionneur ibérique Saura. Ils y aligneront certainement eux-mêmes leurs meilleurs licenciés, Michel Bidart vainqueur du Tour du Bordelais, mis en vedette en Angleterre, Francis Duteil, Christian Bordier, Bernard Fifre et l’une des récentes recrues, Francis Campaner. C’est au siège du CC Bordelais, 203 boulevard Roosevelt à Bordeaux que les coureurs prendront le départ le mardi 25 mai à partir de 10 heures. Nul doute que cette édition réunisse un très beau lot de routiers prémices d’une magnifique arrivée dans le haut de côte de la rue Pagès à Périgueux.
Nota : en 1965, Bordeaux-Périgueux a constitué la dernière édition du calendrier. Depuis, plus jamais cette classique est sortie de ses cendres...
- L’itinéraire : Bordeaux (rassemblement boulevard Roosevelt), 14h00 Bas de côte de Monrepos (départ officiel), 14h20 Camarsac (km 14), 14h45 Branne (km 28), 15h00 Castillon la Bataille (km 40), 15h30 Port Sainte-Foy (km 61), Saint-Médard de Gurçon (km 70), 16h05 Montpon (km 83), Echourgnac (km 98), 16h48 Ribérac (km 116), La Veyssière (km 131), 17h21 Saint-Front de Pradoux (km 139), Douzillac (km 146), 17h39 Neuvic (km 150), 17h44 Saint-Astier (km 159), 18h11 Beaulieu (km 169), 18h13 Chancelade (km 170), 18h17 Gour de l’Arche (km 173), 18h25 Périgueux - arrivée rue Pagès (km 178).
- pour les Périgourdins il s’agit de situer la rue Pagès. Tout d’abord les coureurs arrivaient par le Toulon (rue Pierre Sémard), puis rue Victor Hugo pour virer à gauche en remontant la rue Victor Basch. Ensuite rue Barnalier, rue du Clos Chassaing, puis sur 300 mètres la rue du Therme Saint-Sicaire. Il restait alors à virer côté gauche pour remonter la rue Pagès où se dressent actuellement plusieurs barres d’HLM du quartier Clos Chassaing (sur le versant du coteau qui va sur Champcevinel). Quant à la date choisit, elle se situait au moment de la Foire Exposition des deux villes, c'est-à-dire au mois de mai...
LA COURSE
- Dès la première difficulté, la côte de Camarsac (14° km), la course se décante. Quatorze coureurs se sentent des fourmis dans les jambes et se font la belle : Roger Darrigade, Duteil, Pailler, Ramadour, Grassi, Sinicalchi, Bidart, Plouhinec, Poncet, Fifre, de Santi, Ricou, Teillet et Fantino. Un petit groupe de six composé de Hue, Deloche, Ocana, Dupré, Bordier et Blanc se joint rapidement aux fuyards, à Branne. Derrière le peloton semble se résigner, ce qui incite le remuant Andrault à multiplier les démarrages. Aidé de Mazeaud, Samy et Aranzabal l’espagnol, le Poitevin parvient à réaliser la jonction à Echourgnac. Le peloton coincé à 2’40s poursuit sa léthargie. Suire qui ne veut pas sombrer sans rien faire sort à son tour. Cuch, Chabanne, Célérier, Fort, Ducreux, puis les Rochelais Jean-Claude Angibaud et Jacques Bégué lui filent le train. La poursuite engagée constituera la plus belle passe d’armes de la course. En dix kilomètres, huit hommes déchaînés reprendront 2’40s aux vingt-trois échappés... Les plus costauds sont devant. Sur les petites routes pittoresques de Saint-Astier à Périgueux, de nombreux coureurs tentent de se soustraire à la vigilance de leurs partenaires, sans succès. Seuls Duteil et Ocana laisseront croire un moment à leur réussite, mais tout rentrera dans l’ordre dans la traversée de Périgueux. A 300 mètres de l’arrivée en côte, trente et un coureurs peuvent encore prétendre à la victoire... Roger Darrigade lance le sprint de loin mais sa chaîne le trahit à 30 mètres de la ligne. Le Royannais Jean Ricou bondit et le saute irrémédiablement. Jacques Bégué (2°) donne tout ce qui lui reste de vie et vient mourir sur ses talons.
- Dans les derniers kilomètres six fois, dix fois, des hommes tentèrent de partir. Ils n’y parvinrent pas parce que, en cette fin de course, les voitures se rendant à l’arrivée faussèrent totalement l’épreuve...
- "Mon dieu que je suis content d’avoir gagné". En franchissant la ligne blanche, Jean Ricou leva les bras d’allégresse. Puis il alla s’asseoir par terre dans un coin, se vida sur la tête un bidon d’eau et laissa exploser sa joie et sa rancœur. "Je suis content et c’est bien fait pour vous". Le Royannais Jean Ricou avait été le meilleur au bout de 178 kilomètres d’un Bordeaux-Périgueux explosif. Il avait sagement calqué sa course sur celle de Roger Darrigade, il avait eu le mérite de flairer la bonne échappée, celle où l’on fournirait le moins d’effort, celle qui obligeait les autres concurrents à prendre le guidon par en-dessous pour revenir.
Malchanceux Darrigade ? Son dérailleur était défaillant. Sans aucun doute. Superbe vainqueur Ricou, sans doute aussi...
- Au tableau d’honneur ces deux hommes, mais aussi Andrault, très brillant, Mazeau efficace, Fantino téméraire, Suire clairvoyant, Duteil malchanceux. Et si Bégué et Suire sont 2° et 3°, on peut se demander si les forces que jetèrent ces deux hommes dans cette bataille du retour, ne lui coûtèrent pas la victoire...
- L’organisation ? Pouvant être sérieusement améliorée. Ne serait-il pas possible, notamment d’interdire le passage des voitures après Neuvic, car elles peuvent fort bien se rendre à l’arrivée par la route principale, en traversant la rivière à Saint-Astier ?
Beaucoup de monde autour de Jean Ricou après l'arrivée en 1965
Le classement : 1. Jean Ricou (Royan OC) Groupe sportif Pigeonnier-Frimatic les 178 kms en 4h19’30s, sur cycle Mercier BP, pneus Hutchinson, 2. Bégué (Royan), 3. Suire (CC Bordelais), 4. Darrigade (Dax), 5. Sinicalchi (Marseille), 6. Cuch (ACBB), 7. Mazeau (CC Bordelais), 8. Fantino (Villeneuve), 9. Campaner (CC Bordelais), 10. Fargues (CC Bordelais), 11. Célérier (Villeneuve), 12. Andrault (Poitiers), 13. Sautier (Périgueux), 14. Samy (Limoges), 15. Bidart (CC Bordelais), 16. Deloche (Lalinde), 17. Fifre (CC Bordelais), 18. Angibaud (La Rochelle), etc...
- Jacques Bégué 2° de ce Bordeaux-Périgueux et à qui nous devons ces images est né le 25 mars 1942 à Boulogne Billancourt. Première licence en 1959 en 4° catégorie. 1960 : cinq succès en 3° catégorie, 1961 : accède en 1° catégorie, vainqueur à Saint-Jean d’Angély, vainqueur du challenge Martini des moins de 20 ans,, vainqueur à Bressuire, vainqueur du Kilomètre Rustines à Niort. Sélectionné à la Route de France avec Epaud, Moussard, Laforest et Pailler. Effectue son service militaire de novembre 1961 à mai 1963 en Afrique du Nord. 1963 : licencié indépendant 1° catégorie - 1° à Servant (Morbihan), 1° à Trémentine (Maine et Loire), 1° à Civray (Vienne). 1964 : 1° à Arthenac, 1° à Boupère (Vendée), 1° de l’américaine de Marans avec Jean Ricou. 1965 : licencié indépendant 1° catégorie dans l’équipe Rochelaise "Bar André Cosmao Froid", 1° Champ sur Pére (Vendée), 1° Chaudron en Mauges (Maine et Loire), 1° de l’américaine de La Roche sur Yon avec Angibaud. 1966 : amateur senior hors catégorie "Groupe National Bières 33 Gitane" – Directeur Sportif : Monsieur. Caradec ; 1° à Royan, 1° Sainte-Foy la Grande, 1° à Bourneau (Vendée), 1° à Marans (en individuelle). 1967 : arrêt de la compétition en perspective de monter un cabinet d’expertise automobile.
- Bégué totalise un nombre impressionnant de places d’honneur (dans les cinq premiers) et plus de 50 places dans les dix premiers au cours de ses deux dernières années de compétition. Jacques Bégué connaît bien Jacques Gervais et Claude Hue avec qui il a couru... "Rétro Vélo Dordogne" remercie bien ce coureur pour les documents adressés à notre rédaction.
RÉTRO VÉLO DORDOGNE – BORDEAUX-PERIGUEUX 1965 © BERNARD PECCABIN
La mémoire du cyclisme en Dordogne